Et il y avait tant de mauvaises choses se passaient à Flossenburg. La vie, la vie quotidienne était terrible. On se levait à quatre heures trente... vite, vite, vite, vite, et on allait dans la carrière, on y travaillait pendant douze heures, six jours par semaine, douze heures par jour. Le dimanche avant midi, c'était les corvées, c'est comme ça que ça s'appelait, vous voyez. On nettoyait nos casiers, on nettoyait le baraquement, on se nettoyait, et tout. Après, c'était l'inspection, vous voyez. S'il vous manquait un bouton ou autre chose dans ce genre là, vous étiez puni. Alors, c'était propre. Depuis le début, je dois dire. Oui. Ils nous coupaient les cheveux tous les mois, et toutes les semaines ils nous faisaient une raie au milieu à la tondeuse, vous voyez. Et puis, on allait travailler douze heures par jour. La nourriture n'était pas suffisante pour survivre, quelle que soit votre force, pour survivre six mois, vous voyez? Les gens les plus solides que j'ai rencontrés sont morts en six mois. C'est comme le matin, on n'avait qu'un demi-litre de, comment appelle-t-on ça du café noir, un ersatz de café, un soi-disant café, fait à partir d'écorce... Puis, quand on travaillait dans la carrière, vers neuf heures ils nous donnaient deux tranches de pain avec de la margarine, pour un forçat. A midi, comme vous le voyez sur cette photo, nous avions de la soupe. De la soupe. Aux choux, aux choux rouges. Je pensais ne jamais manger de chou rouge de toute ma vie. Des épinards. Des épinards. Des épinards... Je disais, "C'est pas vrai, encore des épinards," et c'était plein d'eau, vous voyez. Pas de beurre dessus, vous voyez. Alors je me suis promis que tant que je vivrais, je ne mangerais plus d'épinard, plus jamais. Mais, je vais vous dire quelque chose. J'aime les épinards !