Mauthausen avait encore la particularité de quelques autres catégories spécifiques, comme les prisonniers « K » et « RÜ ». La lettre « K » signifiait Kugel (balle). Les détenus qui portaient cette lettre, peinte en noir, parfois en rouge, sur le dos de leur veste, devaient être abattus par balle au cours d’une Kugel Aktionen. Les cibles étaient presque exclusivement des officiers, sous-officiers et commissaires politiques de l’armée soviétiques. Ils ne figuraient pas sur la liste des effectifs. Ils n’avaient pas de numéros d’immatriculation. Ils étaient remis par le commandement de la Wehrmacht à la Gestapo qui les remettait à la SS pour qu’ils soient assassinés. Au cours des Kugel Aktionen, plusieurs centaines de gradés de l’Armée rouge furent liquidés. On les avait concentrés dans le Block 20, appelé aussi Todeblock (Block de la mort). Ils n’y étaient pratiquement pas nourris et n’avaient rien pour se protéger des rigueurs de l’hiver. Ils y mouraient rapidement, ce qui économisait les balles. Le lettre « K » n’empêcha d’ailleurs pas que nombre d’entre eux furent gazés à Mauthausen, Gusen ou Hartheim. On peut considérer qu’en 1944, c’était la seule catégorie de détenus de Mauthausen dont le sort ait été plus terrible encore que celui des juifs. [...]
Et puis il y avait les détenus dont la fiche portait la mention « RÜ ». Elle signalait une « recommandation » de la Gestapo ou d’autres autorités, parmi lesquelles se distinguait le Gauleiter Eigruber : elle spécifiait que « le retour du détenu n’était pas souhaité » (« Rückkehr unerwünscht»). Il s’agissait presque exclusivement de détenus politiques allemands et autrichiens.