Les morts de la journée sont ramenés pour être comptés avec les vivants

Le soir, chaque kommando devant rentrer au complet de son travail, les morts de la journée sont ramenés pour être comptés avec les vivants. Une fois, j'en ai ramené un, suspendu par les pieds et les mains à un branchage porté à deux sur l'épaule. Ses yeux grands ouverts semblaient nous regarder et les pans de sa capote balayaient la chaussée… Les cadavres sont abandonnés en rentrant, à droite de la porte centrale. Chaque chef de Block vient reconnaître les siens et les fait transporter à l'emplacement habituel pour l'appel.

Un soir un homme manquait au retour du kommando Speer. En guise de punition, les SS nous laissent sur la place d'appel jusqu'à 22 heures au garde-à-vous sous la pluie, transis de froid et contraints de chanter. Des dizaines d'hommes s'effondrent, plusieurs succombent. Retrouvé le lendemain sous un tas de ferraille, le manquant est abattu sur place…

Marcel COURADEAU, in Sachso. Au cœur du système concentrationnaire nazi, par l'Amicale d'Oranienburg-Sachsenhausen, Paris, ed. Pocket, collection Terres humaines, 2005, p.109