On se témoignait du respect, on se parlait avec politesse, on se disait bonjour (Kommando de Janowitz)

Quand nous avons débarqué dans ce pays, les habitants remarquèrent que les militaires qui nous encadraient avaient les mêmes pratiques que ceux qui les malmenaient depuis cinq ans. La sympathie des habitants, une sympathie de regard, allait évidemment vers les victimes : nous avons eu l'impression d'un retour en pays civilisé. Chaque matin, nous allions au travail. Une vingtaine prenait sur la gauche la direction de Janovice. Leur chantier était dans le village. Ils voyaient des visages de femmes et d'enfants. Le groupe destiné à la carrière tournait sur la droite en direction de Sébanovice et parcourait trois kilomètres avant d'avoir un excellent accueil sur le chantier ! Des civils généreux et bons travaillaient avec eux. Dans ces débuts notre baraque n'était pas surpeuplée. Elle gardait une certaine propreté, et surtout la vermine ne l'avait pas pénétrée.

Par comparaison avec Flossenbürg que nous venions de quitter, nous goutions en cette baraque un petit quelque chose d'une vie de famille. Il faisait bon y vivre. Aussi, spontanément, on se témoignait du respect, on se parlait avec politesse, on se disait bonjour ...

Louis POUTRAIN, La déportation au cœur d'une vie, Les Editions du CERF, Paris, 1982, p.141