À mort les bourreaux ! Vive la lutte sans merci contre l’occupant !

« Dès que la nouvelle du soulèvement nous fut parvenue, nous lançâmes au nom de l’Organisation juive de combat une proclamation à la population polonaise et au monde entier, à l’aide d’affiches, de tracts, et par la radio clandestine. En voici le texte :

« Polonais ! Citoyens !
Soldats de la Liberté !
Dans le tonnerre des canons avec lesquels l’armée allemande bombarde nos maisons, nos mères, nos femmes, nos enfants,
Dans le crépitement des mitrailleuses,
À travers les nuages de fumée et de feu, par-dessus les flots de sang qui submergent le ghetto de Varsovie massacré,
Nous vous envoyons, nous, prisonniers du ghetto, notre cordial et fraternel salut.
Nous savons que vous assistez avec douleur, avec des larmes de pitié, avec étonnement et horreur à la fin de ce combat que nous menons depuis plusieurs jours déjà contre l’odieux occupant. Sachez que chaque seuil du ghetto continuera d’être une forteresse, que nous mourrons tous dans ce combat plutôt que de nous rendre,
Qu’ensemble avec vous, nous aspirons à la vengeance, à l’expiation de tous les crimes commis par notre ennemi commun,
Nous nous battons pour notre liberté et pour la vôtre,
Pour notre honneur et pour le vôtre,
Pour notre dignité humaine, sociale et nationale comme la vôtre.
Nous voulons venger les crimes d’Auschwitz, de Treblinka, de Belsen, de Majdanek !
Vive la fraternité d’âme et de sang de la Pologne combattante !
Vive la liberté !
À mort les bourreaux !
Vive la lutte sans merci contre l’occupant !

23 avril 1943.
Organisation juive de combat. »

 

Une proclamation dans le même sens fut lancée au nom du Bund clandestin. Ces appels parvinrent au monde extérieur. Il faut au moins que l’on sache – pensions-nous – que ce sont les derniers jours de notre agonie ! Il faut au moins que, plus tard, on nous venge ! Les puissantes armées alliées, dressées sur tous les fronts, combattaient fraternellement. Mais le front du ghetto de Varsovie resta seul. Ses héroïques combattants furent brûlés sur ses ruines. Leurs appels désespérés furent noyés dans les nuages de fumées, étouffés par le tonnerre des canons… »

GOLDSTEIN Bernard, L’ultime combat, nos années au ghetto de Varsovie, Zones, 2008, pp. 184-185