Ma belle brosse !

J'ai accompli un vrai tour de force en la gardant jusqu'à Sachsenhausen, ma belle brosse ! Elle a pour moi une valeur inestimable, car elle me rappelle mes parents. Cependant, un Français insiste pour que je la lui donne en échange d'un petit morceau de pain. Il me presse d'accepter. Je réfléchis longtemps à son offre... environ une semaine... puis un jour, la faim triomphe de ma volonté et je cède à sa demande quand il me montre une petite rondelle de pain grillé qu'il vient de recevoir. L'échange est vite fait. Mais le petit morceau de pain est vite avalé et quelle tristesse, ensuite, d'avoir perdu ce dernier souvenir de mes parents.

Pierre MIGNON, in Sachso. Au cœur du système concentrationnaire nazi, par l'Amicale d'Oranienburg-Sachsenhausen, Paris, ed. Pocket, collection Terres humaines, 2005, p.122