Il était impossible de dissimuler la plus petite chose

A Flossenburg on était fouillé journellement sur la place et au block et même sur le lieu de travail, en partant et en revenant. Il était impossible de dissimuler la plus petite chose. Un délinquant était tué sur place.

Les lits n'étaient pas les mêmes ici, larges de 0,80 cm nous y couchions à trois ou quatre. Ils avaient trois ou quatre étages et malheur à ceux du dessous. N'étaient-ils pas placés sous ceux qui souvent avaient la dysenterie ou urinaient. Ce n'était pas toujours drôle. Ces lits nous devions les avoir pour trois et même quatre à partir de décembre jusqu'à la fin de notre calvaire.

C'est dans ce petit espace et toujours couché sur le côté et sur une paillasse squelettique faite de copeaux avec un morceau de couverture comme je devais avoir plus tard au bloc 9, que je devais me reposer après mes 12 heures de travail et mes 17 heures de présence toujours debout entre le lever et le coucher, lorsque ce n'était pas davantage.

Après cela le régime alimentaire, qui contribuait pour la majeure partie à notre amaigrissement, consistait le matin en un peu de café ou de thé, eau colorée d'un ersatz quelconque ; le midi, un litre de soupe lorsqu'il était bien servi, mais, de la façon de servir la soupe dépendait la contenance et très souvent, hélas, c'était 3/4 de litre... même 1/2 litre qui était versé. Ce potage était composé de légumes déshydratés, d'écorces de haricots secs ou de rares pommes de terre plus ou moins gelées, de rutas et de betteraves. Il faut reconnaître que deux fois, ce furent des nouilles, des vraies : ce jour-là semblait bon. Le soir, un petit quart de boule jusqu'en octobre 1944, ensuite jusqu'en novembre 1/5e, après 1/6e jusqu'à la fin, avec soit une petite tranche de margarine (elle devait complètement disparaître) ou une petite tranche de saucisson de poisson, paraît-il,  entouré de papier, de fromage blanc, ou une petite cuillère de confiture, ou bien souvent rien du tout.

Voici la nourriture journalière pour nos douze heures de travail, par une température oscillant journellement tout l'hiver entre -15° et -22°.

Léon HOEBEKE, Destination la mort (convoi 27.4.44) récit authentique, Paris, Nouvelles éditions Debresse, 1977, p.100